mercredi 11 avril 2012

Préface de Jean Portante pour ce travail d'écriture créative

Ecrire c’est mettre des mots sur les choses. Tout en sachant que le mot et la chose ne sont pas la même chose. Sur le mot chaise, par exemple, personne ne peut s’asseoir. Quand donc des étudiants se mettent à écrire, dans une langue qui n’est pas leur de surcroît, et quel que soit leur niveau, ils se trouvent dans ce dilemme-là. Ils évoluent dans l’univers de l’image des choses. De la métaphore. Dilemme multiplié par deux, lorsque les mots ne viennent pas directement des choses mais de la représentation des choses, comme le fait la peinture. Quand Magritte intitule un de ses tableaux, «Ceci n’est pas une pomme», la pomme qu’on voit n’est pas une pomme, mais l’image d’une pomme. L’image d’une pomme, personne ne peut la manger. Ecrire et peindre empruntent, de ce fait, le même chemin.

Or, ces étudiants sont partis, non des choses elles-mêmes, mais de leur représentation par la peinture. Les voilà donc prêts à raconter leurs histoires. Bien entendu, écrire dans la langue de l’autre, ne facilite pas la tâche. Mais peut-être cela donne-t-il la chance de se tenir à distance, et, dans cette distance-là, de se débarrasser des craintes qui, souvent, font bocage, quand on s’exprime dans sa langue maternelle.

Tel est donc le défi de ces pages. Les mots viennent non d’un dedans profond, mais d’un apprentissage nouveau. Ils sont chargés d’étrangéité. Mais il viennent également d’un autre extérieur qu’est la peinture. Et naît de la rencontre de tout cela une affabulation, une narration, une fiction qui, autrement, n’aurait pas trouvé son chemin pour se dire.
Jean Portante

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